21 mai 2016 / par Ex-Marroco-Cyclo
Le voyage tire à sa fin, je suis (déjà) en région bordelaise, pour une pause familiale de quelques jours, avant de ré-enquiller pour une ultime semaine de pédalage. Des pyrénnées, je n'ai vu que la pancarte indiquant le col (de Roncesvalles), la faute à une météo quelque peu nuageuse :)
Avant-hier encore, je roulais sur les traces du chemin de St Jacques, toujours à l'envers, en direction de Vezelay cette fois-ci. L'occasion de partager une dernière soirée dortoir-odeurs de pieds-ronflages avec des marcheurs, aux motivations multiples et toujours très personnelles. J'ai bifurqué officiellement à Bazas, devant la Cathédrale. 1600 kms au compteur depuis Sevilla :)
Cela fait un mois jour pour jour que j'ai démarré "el camino" du sud de l'Espagne, sans jamais avoir besoin (ni envie en fait) de ressortir la toile de tente. Chaque soir un nouveau refuge pour pélerins, chaque soir une ambiance, et de nouvelles têtes, jeunes ou moins jeunes, plus ou moins dégarnies, mais en très grande majorité souriantes !
Des individus venus de toutes parts (des 4 coins de l'Europe, du Japon, de la Corée du sud, du Canada, d'Amérique du sud et j'en passe), partis depuis la veille ou depuis plusieurs mois ! Paul, que j'ai croisé à Burgos, c'est un gars de Strasbourg qui est parti de chez lui, avec son chien, début février. Il a eu des galères, a dû se faire soigner, peine chaque jour à se faire accepter dans les refuges (le chien) et doit souvent dormir dehors depuis qu'il a renvoyé sa toile de tente, devenue trop lourde sur son dos fatigué. Rencontré devant le refuge municipal, désabusé de s'être fait une fois de plus refusé l'accès. Son chien a pourtant une tête d'ange, on lui donnerait le bon dieu sans confession, mais visiblement, en Espagne, cela ne suffit pas. J'espère qu'il a reçu un accueil favorable auprès des Bomberos...
Des couples de jeunes retraités, des jeunes fraîchement sortis de leur 3 ans d'armée (Israêliens), des octogénaires endurcis, des femmes seules, beaucoup...
Tous n'auront pas le plaisir d'arriver à St Jacques, c'est que le chemin est long (il faut en moyenne 30 jours jours depuis la frontière franco-espagnole). Les éclopés ne sont pas rares ; ampoules taille XXL, entorses, genous récalcitrants, tendons à bout, la liste des bobos est longue et l'on croise régulièrement des béquillards, des pansementés et des mines fatiguées aux arrêts de bus. Car ils n'ont pas perdu espoir de pouvoir reprendre "leur" marche ; il faut juste garder "le rythme" et rejoindre la prochaine étape coûte que coûte. Chaque année, c'est plus ou moins 200.000 pélerins qui débarquent sur la grand place de la "Catedral Metropolitana De Santiago De Compostela".
Je sais pas vous, mais moi ça m'impressionne...
On m'a demandé quelquefois comment je réussissais à suivre le chemin à l'envers. C'est vrai, les indications sont à sens unique. Et à vélo, pas question de se retourner pour vérifier que j'ai pris la bonne piste ! Alors comment faire ? En fait, c'est simple, je n'ai pas de mérite : chaque jour, ce sont près de 150 pélerins qui prennent la route et qui parcourent environ 25km quotidiennement. Moi, en moyenne, je fais 75-80 km par jour. Faites le calcul, je croise donc près de 500 marcheurs chaque jour ! Ce sont donc eux mes indicateurs ! Il suffit que je scrute un peu l'horizon pour m'assurer que je suis toujours sur le bon chemin :)
Et cerise sur le gateau, pendant ce mois de pérégrinations, j'ai fait une méga-cure de sourires (j'en vois qui ricanent). Le soir, aux étapes, lors des repas partagés bien sûr. Mais aussi et surtout sur le chemin. Bah oui, imaginez-vous croiser tous ces visages...
Je sais pas vous, mais moi, ça m'a fait un bien fou.